26.9.06

Question de temps

« Tu verras, c’est tranquille pour nous à l’automne. »

C’est ce qu’elle disait, la boss. Pfff, ne jamais croire les boss.

Entre le bulletin électronique bilingue à préparer pour l’envoi d’AUJOURD’HUI,
le projet Internet à comprendre et à monter pour VENDREDI,
les documents à mettre en ligne MAINTENANT,
les textes à écrire pour les feuillets à imprimer la SEMAINE PROCHAINE,
le téléphone qui sonne pour une demande DRETTE LÀ,
la réunion dans 5 MINUTES,
une MADAME AGRESSANTE dans l’embrasure de ma porte « Comment ça que t’as pas enlevé cette information sur notre site Internet? T’étais pas supposée faire un ménage? »,
un COURRIEL de ma boss « Tu pourrais pas me trouver une photo d’enfant dans notre banque? »,

il y a Chopin.

Il y a Chopin qui traîne dans ma tête son Prélude in E minor, op. 28, no. 4. C’est fou, ça bourdonne autour de moi, et pourtant je n’entends que cette partition piano qui fleurit au bout de mes doigts ces jours-ci. Simplicité. Intensité. Pureté. C’est tout ce dont j’ai envie TOUT LE TEMPS.

Être tranquille à l'AUTOMNE, aussi, j'aimerais ça.

21.9.06

Ce que Gamin veut...

Il avait lancé la chose à la blague, la semaine dernière.

"Ce serait cool que tu viennes habiter ici!"

"Euh... (putain il me les scie totale cette fois-ci, le petit!) euh..."

Regards perdus, sourcils levés vers le père, qui me répond de même. Il est aussi surpris que moi. Dire que je croyais qu'il dictait les répliques à son fils, pour pousser le charme plus loin. Peut-être que ça vient juste du petit, finalement.

"Euh... c'est juste pour que je t'aide avec tes devoirs de français que tu veux que je sois toujours là! Tu veux juste profiter de moi, on sait ben!"

Je pensais avoir récupéré, minimisé, presque ridiculisé la chose. Trop gros pour moi, ça, Gamin. Trop soudain, surtout. Tu ne peux pas me sortir cette déclaration comme ça, ce n'est pas rien ce que tu dis là.

"Mais non! T'es drôle aussi, c'est l'fun quand t'es là."

S'en était suivie une série de "Euh..." sur différents tons, venant du père et de moi. Le Gamin avait probablement enchaîné sur ses derniers exploits à son jeu vidéo, mine de rien.

*

Non content de m'avoir cassée une première fois, le Gamin, il insiste!

Bon, ce que je vous raconte là, ce sont des paroles rapportées. Peut-être que le sexy-papa a mis du beurre dans la sauce. Non, franchement, le Gamin peut pas dire ça!

À son papa: "Ce serait cool que Sauterelle vienne habiter ici, elle est tendre, douce et gogole."

Tendre?
Douce?
Gogole?

Je prends le gogole (mongole-folle-chouette) comme un beau, très beau compliment, venant d'un petit gars de 12 ans. Mais tendre? Quand je le confronte à ses peurs, quand je les dédramatise en riant avec lui? Mais douce? Quand, exaspérée de son "je suis totalement inconscient de tout ce qui m'entoure" tellement typiquement adolescent, je lui lâche un sec "Gamin! Ramasse tes affaires!" que je regrette aussitôt?

Les Gamins, ça pense vraiment des choses comme celles-ci? Tendre, douce, gogole? Ça utilise ces mots?

Ok vite, et je parle aux bibliothécaires et autres libraires parmi vous, existe-t-il un "Les beaux-fils pour les nulles"? Non pas que je me crois nulle... C'est juste que je suis partie de zéro il y a quelques mois, et que ça roule vachement vite là.

Patiente un peu Gamin, j'ai plus 12 ans, moi.
Je cours moins vite, mais je peux marcher longtemps. T'inquiète pas.

20.9.06

Isabelle et moi et le bonheur

Isabelle Boulay à fond dans l’appart ce soir d’automne. Je me paye la traite : je suis seule à la maison.

Isabelle me propulse au fond du Provigo où je travaillais plus jeune. Je me revois toujours, quand j’écoute « Je suis un saule inconsolable » ou « Je t’oublierai, je t’oublierai, je t’oublierai, je t’oublierai » (répétez ad nauseam!) : j’étais en train de ranger les comptoirs de fruits et légumes, à 22 h, seule dans l’épicerie avec les derniers clients, à chanter ces chansons encore et encore, grâce à Cité Rock-Détente… Je les connaissais par cœur, elles m’énervaient, je ne pouvais plus les entendre. C’était mon premier emploi, j’étais au cégep, j’étais acceptée à l’université, le premier amour de ma vie m’attendait dans le stationnement pour une soirée avec les copains. Je râlais sur les chansons d’Isabelle qui me rentraient dans la tête contre mon gré, forcément : elles jouaient 3 fois durant mes 8 heures de travail! …Mais je me sentais heureuse dans ma vie, fière de ce que j’étais.

Durant des années, après le cégep, je ne pouvais plus entendre ces maudites chansons. Elles me ramenaient à cette épicerie, à ce gars-là dans l’auto qui ne m’attendait plus. Les paroles semblaient raconter en direct la déconfiture généralisée de ma vie à ce moment-là.

J’écoute Isabelle ce soir et je suis contente de chanter à tue-tête, son timbre de voix me convient parfaitement. Je souris maintenant en répétant inlassablement « Je t’oublierai ». Les images de l’épicerie me reviennent, de même que cet amour qui n’a pas voulu mourir durant des années après notre rupture… et je souris, oui.

Ces chansons résonnent différemment aujourd’hui. Un peu parce que je me donne le droit de les faire jouer haut et fort, parce que j’accepte d’aimer ça! Beaucoup parce que j’ai l’impression d’écouter ces airs pour la première fois. Je suis de nouveau heureuse. J’accomplis bien mon premier boulot dans ma branche, mon contrat sera probablement prolongé, un homme m’attend sur son vélo, nous avons des projets. Isabelle me fait rendre compte du chemin parcouru d’un bonheur à l’autre.

*

Chiriiiiiii! Dis, tu accepteras d'avoir un CD de Isabelle Boulay dans la maison où tu vivras? Dis, tu me laisseras l'écouter? Si je te jure que je ne me mettrai jamais à jouer des tounes de Céline au piano, tu me laisseras, une fois par année, gueuler avec Isabelle, comme je le fais ce soir? Tu comprendras alors que je serai en train d’apprécier le chemin parcouru entre les bonheurs qui nous auront bercés. Et tu souriras. Ou tu feras exprès pour rentrer plus tard...

19.9.06

Gros rush de nuages

Le coloc no. 2 arrive dans la cuisine ce matin, cheveux en bataille, il attrape une toast, se dépêche, nous lance, à coloc no. 1 et à moi :

"Excusez, je suis super en retard (ndlr: il est 7 h 15!), je vais travailler toute la journée jusqu'à 21 h, on est dans un gros rush à la job, bye!"

Et bonsoir, il est parti (ndlr: bonne journée, dis-je). Je reste bouche bée.

J'interroge le no. 1 : "Euh... Est-ce qu'il a changé de job?"

"Non, pourquoi?"

"Euh... il travaille toujours à Météomédia?..."

Pause. Regards. Jeux de sourcils.

MOUAHAHAHAHAHAH!

12.9.06

Une piste à suivre?

Je peste tous les matins sur la piste. J'arrive en nage au bureau, frustrée du comportement enfantin, égoïste et souvent suicidaire de mes compagnons cyclistes. Ils se mettent en situation dangereuse, mais en plus ils font sacrer les automobilistes, ce qui n'aidera certainement pas notre cause quand viendra le temps de discuter sérieusement d'étendation des pistes. Je cherche depuis des semaines comment raconter la bêtise des vélistes.

Aujourd'hui, j'en suis à ce paragraphe:

Si à vitesse Grand L tu roules,
Si à vitesse Grand V tu te fais dépasser,
Devant tout le monde à la lumière ne va pas te crisser.


Et j'ai aussi pondu ceci, juste pour vous:

Si tu croises un collègue sur la voie, chanceux es-tu.
Mais à la tentation de rouler à ses côtés résiste.
La machine à café n'est pas au bout de la piste.


Wow. Impressive, isn't? Et puis voici aussi:

Si avec sur les oreilles des écouteurs tu roules,
épais tu es, mais te le crier tu ne m'entends pas.

Bon bon ok j'ai les mollets trop gros. Je vais jouer dans le trafic.



5.9.06

Pop! la vie

Trois femmes.
Une mère, une fille, une tante.
Des dizaines de pots Masson remplis de tomates fraîchement cuisinées gisent sur la table, sur le comptoir, sur le frigidaire...
Elles viennent de les faire bouillir.
Elles entendent les "pop!" qui jaillissent, ici et là, un peu partout dans la cuisine.
Elles sursautent de joie chaque fois.
Petites réussites, petits bonheurs.

4.9.06

Cartes postales / Pont d'Avignon, 14 août 2006