27.5.07

Ça et plein d'autres affaires

Il était grand temps qu'une femme entre dans cette vie de vieux et de jeune garçons. Ne serait-ce que pour friser les rubans des paquets-cadeaux, pour lécher le fond des plats ou pour manger les croûtes de pain, je suis la bienvenue. Ça et plein d'autres affaires, comme on dit ici.

13.5.07

Arcade Fire

Hier soir avec l'Amoureux, nous y étions, nous aussi. Aréna Maurice-Richard, pour voir et entendre Arcade Fire.

Voici un lien que j'ai trouvé aujourd'hui en naviguant. Dans l'ascenceur: on en pleurerait tellement c'est beau.

Un concert à emporter de Arcade Fire

8.5.07

Sous la terre et le compost

Je me sentais tout juste un peu mieux dans le monde dans lequel je vis, et puis paf, non, ça recommence, la bêtise humaine m’est remise à la figure. J’ai le cœur en miettes et la rage à l’âme.

*

Admettons que vous apprenez à 50 ans que vous souffrez de sclérose en plaques. Ce verdict est sans appel : c’est la perte de vos capacités physiques peu à peu, mais vous ne savez pas le rythme auquel la maladie évoluera dans votre corps. Vous savez seulement que vous ne marcherez plus, un jour. Bientôt ?

Admettons que, à 53 ans, parce que monter à votre chambre devient chaque jour plus difficile, vous décidez de vendre votre maison pour vous installer dans un condo. Vous payez le gros prix, bien sûr, pour ce condo, mais il est sur un seul étage, bien que beaucoup plus petit que la grande maison. C’est mieux comme ça : vous sauvez des pas. Et puis il a vue sur le fleuve. Tout n’est pas perdu.

Admettons que, à 55 ans, parce qu’il n’y a pas de rampe d’accès qui vous permette de monter à votre bureau, parce que vous ne contrôlez plus très bien votre vessie (c’est humiliant, n’est-ce pas ?), parce que vous vous fatiguez rapidement, vous devez arrêter de travailler. Vous aimiez pourtant votre emploi, beaucoup, vous l’avez aimé durant 30 ans et n’étiez pas prête à prendre votre retraite. Et pourtant vous en êtes rendue là, vous n’avez pas le choix. Trop tôt.

Admettons que, à 60 ans, parce que vous ne vous déplacez plus qu’en fauteuil roulant, parce que votre condo comporte du tapis partout, parce que l’aménagement de votre cuisine ne vous permet pas d’y pénétrer en fauteuil, parce que chaque déplacement dans la maison doit être calculé et prévu en fonction de vos limites, vous décidez d’entreprendre de grandes rénovations pour arracher le tapis, installer des rampes et des poignées un peu partout, agrandir la cuisine, abaisser les comptoirs et retirer l’énorme bain inutile pour installer une douche dans laquelle vous pourrez vous asseoir pour vous laver. Durant les travaux, vous déménagez chez une amie, votre adaptation n’est pas facile, ce n’est pas votre maison, vous n’avez plus de repères où vous tenir sur les murs ou les meubles, vous ne pouvez même pas défaire vos valises seule. Bien sûr, le gouvernement vous aide dans ces travaux. Il vous donne quoi ? 10 000 $ ? Les rénovations vous en coûtent 60 000 $. C’est cher, mais il en va de votre qualité de vie, aujourd’hui. Pour le temps où vous pourrez en profiter.

Admettons que, une fois ces grands travaux terminés, vous voici au moment de la rencontre annuelle de l’assemblée des 120 propriétaires des condos où vous habitez. Vous rassemblez votre courage à deux mains pour proposer l’installation de portes automatiques pour les personnes handicapées. Car non, dans ces luxueuses tours d’habitation, ce service n’existe pas. Vous savez que l’ensemble des propriétaires paie 190 000 $ par année en frais d’entretien des bâtisses. 8 500 $ pour ajouter un système qui servira à tous, qu’est-ce, au fond ?

Admettons que vous avez préparé des notes pour votre présentation. Vous soutenez qu’un tel système rendra service à tous, autant pour vous et les deux autres personnes handicapées qui habitent dans ces condos que pour tous les autres qui rentrent souvent les mains pleines de sacs, ou qui transportent grand-mère. Cela vous semble un projet si pertinent ! Vous êtes donc un peu surprise par la première réplique d’un propriétaire : « Je vous trouve pas gênée de venir nous demander ça, après les rénovations qu’on endure depuis des semaines ! En plus, vous êtes partie vivre ailleurs pendant que nous autres on continuait à entendre ça et à payer nos frais de condo. »

Admettons que vous réussissez à rassembler vos idées après ce coup droit à l’estomac. Vous êtes éberluée, mais vous réussissez à aligner quelques mots : « J’ai payé mes frais comme vous et mon appartement était pratiquement invivable. Je vous jure que si j’avais pu éviter ces rénovations, je l’aurais fait. » Vous n’avez pas le temps de continuer votre phrase. Quelqu’un d’autre vous répond : « Vous avez eu des subventions pour les rénovations ? Vous auriez pu utiliser l’argent pour les portes ! »

Admettons que vous retenez vos larmes. C’est trop ridicule et insensée, cette discussion ! Vous vous justifiez : « Oui, le gouvernement m’a aidée. Il me prête d’ailleurs le fauteuil dans lequel je suis assise aujourd’hui. Mais je crois aussi qu’il en tient à chacun de faire sa part pour que tous vivent mieux ensemble. Le gouvernement ne peut pas tout faire. » Et bang, un autre coup : « Ben c’est mes taxes qui ont payé ce fauteuil-là ! Pis si vous voulez des portes automatiques, il y a une résidence pour ceux qui ont la sclérose en plaque, dans l’ouest de l’île. »

Admettons que vous accusez réception de cette hargne, de ce chacun-pour-soi ignoble qui émane de cette assemblée. Vous déglutissez péniblement, vous vous apprêtez à continuer la bataille. Quelqu’un intervient : « Je demande le vote là-dessus ! » La discussion est close automatiquement. On vote secrètement. Et le verdict tombe, un autre. C’est non, à 66 %.

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Enterrez-moi creux sous la terre et le compost, faites-moi pousser les pieds à l’envers, le soleil donne le cancer et l’eau est polluée anyway. Je ne veux pas faire partie de ce monde-là.