5.3.06

À mon souffle d'homme

À mon souffle d’homme,

Voici mon histoire, le récit de mes écumes délicieuses. Je l’encre sur papier blanc afin de l’insérer en vase clos et de la rendre à la mer, là où elle revivra. Maintenant que les vents lisses nous poussent au large, te souviens-tu de mes furies initiales?

… À marée basse, à l’aube du vent, j’avançais dans des dunes immenses. Je m’ensablais, ma trace était éphémère. Soudain, l’alizé s’est emballé, j’ai senti ma robe écarlate frétiller autour de mes jambes. L’horizon s’est teinté d’émeraude, s’est ouvert dans ton sillage.

Tu étais un rêve devant moi, une parcelle de brume qui voltigeait continuellement. Tu entraînais les moineaux-tisserands à ta suite, je les entendais chanter! Ils berçaient la vie dans mon ventre, rythmaient la caresse des paons.

Tu tenais autour de mon âme le voile pur des ancres divines. J’y suis entrée et je me suis écroulée. Je résistais à ce vent chaud qui tintinnabulait dans mon limaçon. Et puis j’ai abdiqué, épuisée de désirs. Je t’ai permis de poser une borne sur mes jours. J’ai pénétré en ton maelström et m’y suis recueillie sereinement. Tu avais trouvé notre spi, mon amour!

Pour toi, voilà dévoilées mes premières inflexions. Et aujourd’hui…

Et aujourd’hui c’est notre tourbillon, je suis dans l’œil, amoureuse, goûtant ma chance, heureuse. Je fais à l’instant partie de cette cité de tant de chants, d’âmes ondulées, de toi et de moi. Je ne demande plus rien : que cette voile de bateau fou qui tourne et se retourne sur nous, nous engouffre dans sa tempête salvatrice. Je pose un pied sur ce voilier, notre île mouvante, qui nous entourloupe et nous anéambule.

Je souhaite que le vent nous porte derrière ces dentelles là-bas. Les vois-tu, au bout de mon doigt? Allez, on y va!

Ton ombrelle